À la rencontre de Clément Legain, guide au Groenland
Aujourd’hui, nous avons rencontré Clément Legain, guide et fin connaisseur du monde polaire. De son premier contact avec l’Arctique à son quotidien sur le terrain, il nous partage son parcours, ses conseils et ses anecdotes sur les séjours au Groenland.
Préparez-vous à plonger dans les coulisses d’un métier hors du commun !

Raconte nous ton histoire...D'où viens-tu ? Et comment es-tu devenu guide ?
J'ai beaucoup voyagé pour moi après les études et à la fin de tous ces voyages, je me suis dit : il faut quand même que je trouve quelque chose qui me permette encore de voyager, d'être dehors et d'être au contact des gens. J'avais déjà passé mon diplôme d'accompagnateur montagne, je m'étais dit que ça apporterait un truc en plus à mon profil et surtout la possibilité de peut-être pouvoir par la suite combiner ça avec mes études en sport.

Comment as-tu commencé à guider ?

Tu guidais uniquement en Islande ?
Qu'est-ce qui te passionne le plus dans ton métier de guide ?
Ce que je préfère dans le guidage, c'est le premier jour, même si c'est celui qui m'angoisse le plus. C'est de recevoir le groupe et de leur expliquer le briefing. C'est le moment le plus intéressant.

Quelle est la journée type d'un guide ?
En gros, tu es le premier levé, tu es le dernier couché. Tu te lèves assez tôt pour préparer le petit-déjeuner, tu parles avec les gens du programme. Après, tu as la journée dehors, rando ou transport. C'est peut-être la partie la plus facile, on va dire. C'est celle où tu ne fais presque que guider. Tu te fais plaisir parce que tu vois tous ces paysages.
Le soir, quand on arrive, c'est la partie la plus longue parce qu'il faut cuisiner, il faut répondre à toutes les questions, cuisiner avec eux, préparer le repas du lendemain, parler de la journée du lendemain. Franchement, c'est une vie quotidienne. Après, sur certains séjours spécifiques, il y a des rondes, une grosse sécurité à avoir avec les ours, mais également avec la gestion du froid, ça ajoute encore une responsabilité supplémentaire.
Justement cette partie sécurité, est-ce que c'est quelque chose qui te stresse plus ?
C'est juste qu'il faut vraiment, en amont, que tu sois bien au clair sur ce que tu vas leur dire et comment. Souvent, je me suis reproché d’être peut-être trop laxiste et de transmettre les informations trop facilement lors de ces types de séjours. Il faut comprendre les risques et savoir rassurer le groupe.
Est-ce que tu as déjà eu des expériences avec des ours ?
C'est la seule fois où tu en as vu ?

Il y a les expéditions et les autres séjours, c'est quoi ton préféré ?
Est-ce que tu pourrais nous partager une anecdote ou une expérience que tu as vécue avec un de tes groupes que tu guidais lors d'un séjour ?
Sur le séjour en baie de Disko, on a des moments privilégiés en kayak, avec la rencontre des baleines. Et ça, t'es autant excité qu'apeuré, parce que tu sais que normalement, tu ne crains rien. Mais on a eu plusieurs fois des baleines qui sont sorties, à moins de 20 mètres, la gueule ouverte. Elles te passent sous le kayak, complètement.
Ce qui est incroyable, c'est que cet animal, qui peut faire 15 tonnes pour 10 à 15 mètres, sort à 20 mètres de ton kayak. Et quand il replonge, même toi, un plongeon dans la piscine, c'est pire, tu vois. Elle a une grâce incroyable, elle vient passer sa nageoire pectorale, qui fait 4 à 5 mètres de long, sous ton kayak. C'est un sentiment mélangé entre de la peur et la beauté de la rencontre.
C'est assez incroyable ces rencontres, c'est de bons moments, parce qu'en général, il n'y a pas grand risque.

Quels conseils donnerais tu aux gens qui veulent partir au Groenland ou en expé ?
Je recommanderais de bien être préparer, physiquement et mentalement. Il faut avoir accumulée de l'expérience sur du bivouac, plusieurs nuits en tentes dans des conditions froides.
Le plus dur dans le séjour, ce n'est pas la journée, mais plutôt le soir, quand tu montes le camp, la tente, les rondes... il n'y a pas beaucoup d'activités à faire, donc tu luttes un peu contre le froid. Le physique, tout le monde va endurer, mais c'est une lutte mentale également, qui peut-être plus compliqué à gérer. Même nous les guides, on n'a pas plaisir à être à -25°C tous les soirs.
A quelle période et où partir au Groenland?
J’ai des gens qui viennent l’été et l’hiver, c'est deux mondes différents mais qui méritent vraiment chacun d'être découvert.
Si je devais recommander d’aller au Groenland l’hiver j’irais plutôt à l’Est, parce qu’il y a une variété de paysages plus prononcée. Il y a des petits villages que tu croises, c'est très beau.
Et sur les séjours estivaux, le trek à l’Est est incroyable. À chaque fois, les retours des gens qui font ce trek sont unanimes : il est magnifique.
Mais l’Ouest, avec la partie kayak, les baleines et les icebergs, est assez incroyable aussi.
Y a-t-il des aspects de la culture groenlandaise que tu aimes particulièrement partager avec ton groupe ?
J'aime beaucoup parler de l'histoire du Groenland, parce que personne ne la connaît vraiment. Quand tu arrives là-bas, tu ne sais pas trop. Tu n'as jamais appris ça à l'école. Ce n'est pas comme l'histoire des Grecs ou des Égyptiens, où tu as une vague idée de ce qu’il en était.
Comment ils sont arrivés, d'où ils viennent... Je trouve que c'est vraiment intéressant. L'histoire est pleine de rebondissements. Elle est longue, c'est vieux. On ne s'y attend pas, mais c'est peuplé depuis 2000 ans avant Jésus-Christ. C'est quand même quelque chose !
Tu as un vrai dépaysement culturel. Ils ont des coutumes, une culture chamanique. Ils mangent du phoque, de la baleine... Ce n'est pas comme chez nous.
